LA QUINZAINE DOCUMENTAIRE Toubib du 13 au 26-11-24
mer. 13 nov.
|LE COLISÉE CARCASSONNE
TOUBIB Documentaire France - 1h53 (28/08/2024) De Antoine Page Avec Angel Page


Heure et lieu
13 nov. 2024, 18:00 – 26 nov. 2024, 20:00
LE COLISÉE CARCASSONNE
À propos de l'événement
HORAIRES
5 séances avec des horaires pouvant varier de quelques minutes :
Les jours et horaires précis sont déterminés chaque semaine par le Colisée
Mercredi 13/11 : 18h - Vendredi 15/11 : 14h - Dimanche 17/11 : 18h15.
Jeudi 21/11 : 16h20 - Mardi 26/11 : 20h30.
SYNOPSIS
Bac en poche, Angel, 18 ans, choisit de « faire médecine ». Antoine, son frère réalisateur, décide de suivre son parcours, et se lance dans un film qui durera douze ans. Douze ans d’apprentissage, du marathon d’examens aux premières consultations, de l’adrénaline des stages en hôpitaux aux méditations solitaires d’un jeune médecin de campagne. Douze ans de vie ponctués de remises en question et de prises de conscience, qui conduiront Angel à s’engager en faveur d’une médecine sociale. Trajectoire singulière sur fond de pandémie, Toubib est un voyage au cœur de notre « état de santé » : ce qui nous lie à la vie, à la mort.
CRITIQUES
L’Obs :
Dans ce beau film hors norme basé sur le temps long, le réalisateur Antoine Page décide spontanément de filmer son frère Angel lors de ses douze années d’apprentissage de la médecine, sans savoir si ce dernier les mènera à terme. Il faut dire que leur père, Guy, disparu à l’orée de leur adolescence, était généraliste. Au bourrage de crâne des débuts (« C’est un travail de con. Il n’y a aucune réflexion, sauf sur un pauvre exercice de physique »), succèdent donc une année Erasmus à Sofia, en Bulgarie – Angel se poste alors devant une webcam –, des stages dans divers hôpitaux, mais aussi la relation, de plus en plus soutenue, avec les patients. Surgissent surtout les remises en question et les interrogations d’Angel.
Car ce journal intime, bricolé en famille, sur le passage de l’adolescence à l’âge adulte se leste bientôt d’un état des lieux politique de notre système de santé. Le « toubib », capable de prendre un congé sabbatique pour aller faire le berger six mois en Suisse, se confronte aux rapports hiérarchiques, à la fin de vie, aux déserts médicaux, aux injustices sociales : « Les pauvres sont plus malades, on le sait mais on ne le dit pas. » Il est donc touchant de voir Angel choisir d’exercer dans un centre de santé communautaire, lieu d’accueil où l’on dépasse les pathologies pour soigner les inégalités, mettant ainsi ses convictions au service de son métier.
Le Monde :
Pendant douze ans, Antoine Page a filmé son petit frère Angel, tout au long de ses études de médecine, entamées à Besançon. Par-delà la rareté du document, qui consiste à entrer dans la vie d’un jeune homme occupé par une infinité d’heures de révision, de pratique et d’examens, il en ressort un naturel sans pareil. On sait gré au futur docteur d’envisager les « face caméra » (au minimum tous les six mois) comme des occasions favorables à l’esprit d’escalier, aux remarques anodines, aux éclairs de génie, d’où procède une désinvolture très attachante, à peine contrariée par la mèche de cheveux qu’il tournicote machinalement.
Ce journal de bord, dont les scènes se succèdent sans jamais s’appesantir, laisse émerger les sujets sans forcer les événements – puisqu’il n’a de comptes à rendre à aucune production au moins pendant les onze premières années. Il n’est ni la démonstration d’un système en crise, ni l’effort d’héroïsation d’un médecin, ni la description du lien affectif avec ses patients. Plutôt un très beau portrait en mouvement
Télérama :
C’est l’histoire d’un frère, Antoine, qui filme son cadet, Angel, pendant douze ans, avec les moyens du bord. Un frère cinéphile, comme on le découvrira au fil de leurs échanges, pointus, sur les BO de cinéma. Il va suivre le long parcours de l’étudiant en médecine vers cette déclaration pleine d’humilité : « Je suis le docteur Page… comme “une page”. » Et c’est bien le processus d’écriture sur une page blanche, peu à peu remplie, enrichie d’annotations, de doutes et de volonté sereine, que raconte ce documentaire simple comme bonjour.
Quoi de neuf, docteur ? Pas grand-chose, hélas, ainsi que commence par le confier, face caméra, Angel, 18 ans, frais bachelier à Besançon, qui a choisi de « faire médecine » : des révisions sans fin, où l’on apprend par cœur en se demandant à quoi cela sert, ou plutôt à quoi cela servira quand on se retrouvera face à des malades. La fatigue, les cernes sous les yeux, les cheveux en pétard, les trajets au petit matin, après avoir raclé le givre sur le pare-brise, pour se rendre à la fac, les couloirs tristounets d’un hôpital où l’on se sent inutile… Puis les stages, et même un Erasmus à Sofia, en Bulgarie : Angel est fier de se débrouiller seul, même s’il y a des cafards dans le petit appartement en colocation… Les années passent, l’expérience grandit, Angel décide d’être, un temps, médecin de campagne, puis de se consacrer à la médecine sociale dans une association de quartiers de Marseille où il faut des interprètes pour communiquer avec les patients… Et voilà, Angel est un homme. Et il est toubib.
On nous dira que le cinéma (Première Année) ou la série (Hippocrate) d’un Thomas Lilti nous avaient tout montré de ce métier entre sacerdoce et insomnies, mais ce documentaire-vérité rafraîchit la page, justement, en laissant le temps au temps, et en laissant parler Angel, qui porte bien son prénom. La parole de ce jeune homme est d’or, décryptant chaque faille de ses études, cherchant à améliorer son métier avant même de l’exercer, et trouvant dans le décès prématuré de son père la source de sa vocation… Une parole douce et convaincue, une parole « de gauche » comme on en rêve, venue du terrain et renforcée par chacune des étapes qu’il a choisi de vivre, sans penser à se couper les cheveux – c’est tout bête, mais il y a beaucoup de cinéma dans les états capillaires successifs de ce héros ordinaire ! Quand Angel parle de « santé » avec ses yeux toujours un peu rêveurs, il ausculte le monde à sa manière, et on se dit que rien n’est perdu de l’humanisme.
Libération :
On connaît la blague (de carabin) : toubib or not toubib. Le documentaire d’Antoine Page sur son frère cadet Angel, trêve de plaisanterie, se collète la puissance de vie (to be toubib). On n’est plus chez Molière, le médecin malgré lui doit s’arc-bouter. Devenir toubib c’est long, pas donné. Le film commencé en 2009, à l’entrée en fac à Besançon, et achevé en 2021 sur un automnal paysage cévenol, se risque fraternellement, sans savoir si le petit frère ira au bout de ses études. Le temps que la fonction fasse le larron, que la médecine fasse le toubib.
Le travail. La solitude. Le doute. Trinité rarement filmée comme ici, au plus près, home made, entre frangins. Toubib est un récit d’apprentissage par essence, ainsi de ces films qui brossent un portrait (de famille) au long cours, comme firent Boyhood de Richard Linklater et Vivere de Judith Abitbol aux deux bouts de l’existence, sur des années. L’apprentissage est cette posture particulière tenant du travail et pas encore du métier, de l’étude et pas encore de la charge. Douze années suivies par ce grand frère cinéaste et producteur s’étant donné les moyens de son indépendance, et le temps que ça prend pour «faire médecine», et un film parfois, découpant son documentaire en chapitres – première année, deuxième année et troisième année, externat, internat, thèse etc.
Vocation, découragement, travail acharné, épuisement, loupés (ah, faire une piqûre…), voyages, stages, gravissement des échelons du savoir et de la pratique, questionnements des origines (la rapport au père médecin auquel le film est dédié, mort quand Angel avait 11 ans) et sur sa destinée à soi, généraliste ou spécialiste. Il faut suivre Angel sur autant d’années pour obtenir le portrait exemplaire d’un personnage qui paradoxalement ne représente que lui, ce qu’il devient et ce que l’apprentissage, savoir et expérience, lui dicte. Par exemple, que la première chose à faire pour que la situation de l’hôpital, et des déserts médicaux, change, est de voter à gauche.
Antoine Page a ainsi filmé Angel Page – «comme la page d’un livre» dit ce dernier pour décliner son identité. Les frères qui font du cinéma, des Coen aux Taviani en passant par les Safdie, Larrieu ou Quay, sont légion. Ici c’est autrement fait, les postes différemment distribués, devant et derrière la caméra, le cinéaste filmant l’acteur son cadet, documentant leur beau rapport fraternel au passage. La qualité de l’intimisme, secret et solitude toujours, hormis quelques scènes de groupe à la fac ou pendant les sessions d’examens, est précieuse.
L’enseignement est aride et le défi – soigner ses semblables – démesuré. Mais apprendre, c’est apprendre le vaste monde : de Besançon à Sofia, de Marseille (le Château en santé, centre de soins associatif des quartiers Nord) aux Cévennes, sans compter les nombreux stages, Toubib enregistre toutes les couleurs et les saisons, les barbes coupées et les disciplines longues (chirurgie ophtalmologique, réanimation, pneumologie…). Du frère, il scrute l’évolution rigoureuse et brouillonne, les saccades, l’abnégation, les rires, l’exercice du secret. «La médecine, c’est un espace secret, en quelque sorte, car le secret médical est au centre de la pratique.»
Bande annonce =>TOUBIB